Appel à contributions : Les savoirs d'expérience en santé. Fondements épistémologiques et enjeux identitaires

date limite: 
dates:  -
lieu:  Université de Lorraine – Metz

 

Argumentaire

Les travaux en anthropologie de la santé et de la maladie ont classiquement cherché à mieux comprendre les formes syncrétiques qui caractérisent les différents savoirs liés à la santé. Cette thématique de recherche trouve notamment ses terrains de prédilection dans des contextes socioculturels tels que l'Afrique, l'Asie, l'Amérique Latine où le savoir biomédical côtoie d'autres savoirs dits « traditionnels » ou « néotraditionnels » (Egrot, Simon, 2012), constituant des systèmes de santé « hybrides » dont les anthropologues ont cherché à décrire les ressorts thérapeutiques et les enjeux sociaux. L'anthropologie du médicament a ainsi décrit comment les médicaments néotraditionnels indiens, par exemple, sont avancés comme des objets qui s'inscrivent en décalage, d'une part, avec des modèles de développement centrés sur les transferts de connaissances et de techniques des Nords vers les Suds et, d'autre part, avec le paradigme scientifique dominant en biomédecine (Baxerres, Simon, 2013 ; Gaudillière, Pordié, 2012).

La réflexion que nous entendons mener sur les savoirs d'expérience s'inscrit dans la continuité de ces recherches conduites dans les pays des Suds et dans des contextes de changements sociaux et de pluralisme médical. Il s'agira toutefois de les poursuivre dans le contexte occidental en focalisant cette fois le regard sur les savoirs élaborés par les patients et les soignants à partir de leurs expériences respectives de la maladie, qu'elle soit partagée ou non. Penser la maladie à travers l'expérience de ceux qui la vivent ou qui la soignent au quotidien rejoint les prémisses d'une médecine dite empirique et clinique (distincte du modèle dominant de l'« evidence based medicine ») dans laquelle la trame non maitrisée de « l'événement » conserve une place dans la connaissance en santé.

Les évolutions récentes du champ de la santé dans le contexte occidental conduisent effectivement à repenser les rapports entre les différentes formes de savoirs de santé et en particulier entre les savoirs biomédicaux professionnels et les savoirs d'expérience des patients. À ce titre, ce colloque s'inscrit dans une réflexion transversale au champ de la santé sur l'éducation thérapeutique. La chronicisation des affections, le développement des réseaux de santé, l'affirmation des associations de patients et les mutations de l'information sanitaire via le développement des outils numériques au cours des dernières décennies ont conduit à la remise en cause du modèle paternaliste de la relation de soin contribuant à rééquilibrer cette relation asymétrique ainsi que l'expertise unique du médecin sur la maladie (Lemire, 2010). Cette évolution a permis, entre autres choses, l'émergence d'une nouvelle forme de connaissance, appelée savoir ou expertise
« expérientielle » du patient (Caron Flinterman et al. 2005), aujourd'hui cristallisée dans l'émergence d'une nouvelle catégorie de patients : les patients dits experts. Plus profondément, ce changement dans la relation inaugure l'idée selon laquelle le « savoir » ne serait plus exclusivement du côté du soignant tandis que l'« expérience » ne serait plus l'apanage du seul « patient » ou « malade ». Interroger le « savoir expérientiel » du patient comme du soignant, entendre leur savoir acquis à travers leur pratique de la maladie, ouvre la voie à une réflexion nouvelle qui permettrait non seulement de revisiter les fondamentaux épistémologiques de la dichotomie « savoir/expérience », mais également de dépasser celle qui sépare soignants et soignés dans leur rapport à la connaissance. Une telle approche relèverait ainsi d'une forme d'anthropologie symétrique (Latour, 1991) appliquée au domaine de la santé, et ne manque pas de soulever une autre question essentielle, à savoir celle de la possibilité et des modalités du partage des expériences dans la relation de soin et de la prise en charge.

Le colloque organisé à l'université de Lorraine en partenariat avec l'université de Nice a pour objectif d'offrir des perspectives d'approfondissement des savoirs expérientiels des patients et des soignants à partir de deux enjeux essentiels : les fondements épistémologiques et les enjeux identitaires des savoirs d'expérience en santé. 

Calendrier

Les propositions de communications (problématique, méthode et résultats) sont à soumettre en français à l'adresse suivante : crem-colloque-experiences@univ-lorraine.fr, en 300 mots maximum, avant le 30 juin 2016.

Retour des avis le 01 septembre 2016.

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