PROLONGATION = Appel à contributions n°10 de la revue Recherches en danse

date limite: 

Observer, analyser et dire le geste dansé

Numéro coordonné par Federica Fratagnoli, Nicole Harbonnier et Christine Roquet

De l’analyse du mouvement
 
Observer, analyser et dire le geste dansé sont trois actes fondateurs de l’une des pratiques les plus courantes du champ de la danse de scène en France depuis les années 1990. On peut regrouper sous l’appellation élargie d’analyse du mouvement ces pratiques qui font de l’expérience du geste, de son observation et de son interprétation (sa « lecture ») le cœur du travail en danse. Dans le champ de la formation, l’Analyse fonctionnelle du corps dans le mouvement dansé (AFCMD1), appelée à ses débuts « kinésiologie » (ou « science du mouvement »), irrigue les savoirs techniques des danseuses et des danseurs, qu’ils et elles se consacrent à l’enseignement ou non. Dans le champ de la création chorégraphique et/ou du travail d’interprétation, les savoirs des analystes du mouvement ont trouvé également à s’épanouir, en un échange incessant entre les artistes créateurs (d’œuvres et de gestes) et leurs observateurs et observatrices immergé·es à leur côté dans les processus de création. Parallèlement aux spécialistes de système de notation qui ont la compétence de retranscrire sur partition le dessin du geste dansé, les analystes du mouvement interrogent davantage la « couleur » du geste, ses tonalités dynamiques, ses nuances, ses variations infimes.
Dans la triple nécessité de percevoir, d’identifier et de désigner, l’analyse du mouvement a pour mission non seulement de décrire le mouvement mais aussi de l’analyser, d’en chercher les conditions de possibilité, c’est-à-dire ce qui rend possible le phénomène, que l’on bouge ou regarde bouger. L’approche qualitative du geste et de la posture dans laquelle les praticiennes et les praticiens sont engagé·es ne manque pas alors d’interroger comment le geste fait sens pour celui ou celle qui en est traversé·e. Dans le champ des études universitaires en danse, cette mouvance constitue ce que l’on pourrait appeler une « approche complexe du geste expressif2 ». L’analyse esthétique, la critique, l’histoire des œuvres et des pratiques de danse peuvent se nourrir du regard désirant et explorateur de celles et ceux qui ont fait de la lecture du geste la perspective privilégiée de leur regard sur la danse.
 
Comment faire ?
 
« Comment moduler ma palette expressive ? », peut se demander l’interprète ; « comment développer des outils d’analyse qui rendent compte de la singularité du geste de l’autre ? », peut se demander le ou la pédagogue ; « comment développer mon autonomie gestuelle et perceptive à partir des connaissances traversées ? » se demande l’apprenti danseur ; « quels savoirs autres permettraient de nourrir mes interrogations et intuitions artistiques » peut se demander le ou la chorégraphe ; « qu’est-ce qui m’émeut dans le geste de l’autre ? » s’interroge le spectateur ; « quelles sont les questions sous-tendues par mon regard ? » s’interroge le chercheur ou la chercheuse en ce domaine. Les outils de lecture du geste de l’analyse du mouvement, qu’ils soient issus de systèmes déjà plus ou moins cernés en amont (les systèmes labaniens ou l’idéokinésis, par exemple) ou bien qu’ils empruntent à d’autres champs de connaissances (biomécanique, neurophysiologie, psychologie, etc.) évoluent selon les problèmes toujours contextualisés auxquels ils aspirent à répondre.
 
Que dire ?
 
Le regard de l’analyse du mouvement est porté par une pratique, il constitue l’un des savoirs incorporés par les danseurs et danseuses sans que cela ne soit toujours ni su et ni reconnu hors du studio ou de la scène. « Je veux savoir ce que je fais » disait la regrettée Trisha Brown. À cette remarque, tout analyste du mouvement pourrait ajouter en quelque sorte : « je veux savoir ce que je regarde et comment je regarde ». Ce champ très axé sur la pratique peut s’ouvrir sans mal aux champs des danses dites sociales ou rituelles, ses outils venant alors compléter ceux des historiens et des historiennes, des anthropologues ou des sociologues. Encore peu théorisée, l’analyse du mouvement est un domaine en jachère d’écrits théoriques, parce que la question du geste humain est souvent occultée (dans le champ des sciences humaines et sociales) par le recours au concept de « corps » qui n’aide pas toujours à en penser la complexité. Toute pratique s’articule à une théorie, qu’elle soit exprimée ou latente, reconnue ou ignorée. Dans un contexte où les études sur l’analyse du mouvement en danse sont rares et dispersées, ce numéro 10 de la revue Recherches en danse entend contribuer à faire (re)connaître ce champ de recherches, ses pratiques et ses théories, au sein des études francophones mais également à permettre au geste de dire ce qu’il fait, ce qu’il nous fait et comment il le fait.
 
A quoi ça sert ?
 
Comme tout « outil », l’analyse du mouvement n’échappe pas aux différents enjeux qui sous-tendent son utilisation. Que ces enjeux soient de nature politique, sociologique ou esthétique, exercer son regard, développer un vocabulaire spécialisé et comprendre son propre mouvement ou le mouvement de l’autre constituent en soi un pouvoir qui sera utilisé pour générer différents effets. Si la compréhension de son propre mouvement peut, par exemple, favoriser l’autonomie de l’apprenant face au professeur ou de l’interprète face au chorégraphe, elle pourrait aussi constituer un outil de domination quand elle est utilisée sur le mouvement de l’autre. Selon les contextes et les points de vue, l’analyse du mouvement peut servir d’outil de création ou d’interprétation pour l’artiste – chorégraphe ou danseur – qui désire préciser, ouvrir ou moduler sa palette expressive ; viser une certaine efficacité dans l’optimisation de ses coordinations ; fonder un outil d’évaluation pour des examens en danse ; féconder une communication pertinente pour l’enseignant, le chorégraphe ou le critique d’art chorégraphique ; alimenter les recherches qu’elles soient d’ordre esthétique, anthropologique ou historique…
 
A quelles conditions ?
 
Comme tout outil, l’analyse du mouvement requiert le développement d’une expertise qui se construit notamment dans l’expérience sensible et incarnée du regard, nourri d’une multi-sensorialité empathique, une véritable « école du regard3 », pour reprendre l’expression d’Hubert Godard. Or, cette activité du regard s’appuie, d’une part, sur notre propre expérience du mouvement que l’on observe et analyse et, d’autre part, sur les différents champs de connaissance pertinents à sa compréhension. Cet entrelacement entre expérience subjective et savoirs nous amène à relever plusieurs défis comme : être conscient de nos propres filtres perceptifs, mettre en mots et donner du sens à l’expérience empathique du regard, ou encore interroger les dimensions politiques, sociales et culturelles du geste et de sa perception.
 
Les axes des contributions attendues
Les contributions pourront s’inscrire dans un ou plusieurs des six axes suivants (qui n’épuisent pas le sujet et n’excluent pas non plus des propositions voisines de ces axes) :

  • Les différentes approches et pratiques d’analyse du mouvement et les situations et contextes dans lesquelles elles sont mobilisées ;
  • Les savoirs véhiculés par les différentes approches et pratiques d’analyse du mouvement ;
  • Les différentes fonctions de l’analyse du mouvement selon les situations et les contextes ;
  • La circulation et la transmission des savoirs, des pratiques et des discours d’analyse du mouvement ;
  • Comment mettre en mots et donner du sens au regard porté sur le geste dansé ?

1. Voir bibliographie sur le site d’Accord cinétique http://www.afcmd.com/ (consulté le 11 mars 2020).

2. Cf. ROQUET Christine, Vu du geste. Interpréter le mouvement dansé, Pantin, Centre national de la danse, 2019.
HARBONNIER Nicole, LYON Emmanuelle, VUILLEUMIER Valentine, et al. Regards croisés au cœur de l’Analyse Fonctionnelle du Corps dans le Mouvement Dansé (AFCMD), Paris, Programme d'aide à la recherche, Centre national de la danse, 2019.

3. Brochure du CND (Centre National de la Danse) pour la formation de formateurs en AFMD (janvier 2001 à juin 2003).

Informations pratiques

Les articles peuvent prendre la forme d’études de cas, d’études comparatives ou synthétiques, d’entretiens ou de témoignages.
Cet appel concerne plusieurs rubriques de la revue : articles scientifiques, témoignages et entretiens, regards croisés, analyses de démarche de recherche, traductions (d’articles ou d’extraits d’ouvrages publiés)…

Délais et modalités
Les résumés des propositions de contribution (de 10 à 15 lignes) sont à envoyer par mail en fichier attaché à : revue@chercheurs-en-danse.com avant le 19 août 2020.


Le nom du fichier adressé en pièce jointe comportera le nom du contributeur, soit :
« CONTRIBUTEUR.doc ».
La revue enverra systématiquement un accusé de réception suite à chaque proposition dans un délai maximum de 15 jours. Sinon, la contributrice ou le contributeur doit renouveler son envoi.
Les décisions du comité scientifique éditorial seront délivrées aux auteurs à partir du 28 septembre 2020.
Les articles retenus devront être envoyés dans leur forme définitive pour le 4 janvier 2021.
 
Indications aux auteurs
En publiant dans Recherches en danse, l’auteur accepte de céder son droit d’auteur à la revue. Il n’est pas rémunéré pour sa contribution. Par conséquent, toute republication intégrale est soumise à l’accord du comité scientifique éditorial et doit être demandée par l’auteur à la revue Recherches en danse.
 
Format
Les textes proposés ne doivent pas avoir été publiés ailleurs auparavant. Ils seront rédigés en langue française.
Ils feront de 20 000 à 35 000 signes (espaces et notes comprises).
Le texte sera enregistré sous Word (.doc).
Vous trouverez ci-joints les critères de mise aux normes typographiques et de mise en page. Tout article qui ne suivra pas scrupuleusement les normes typographiques ne fera pas l’objet d’expertise. 
Il est obligatoire de fournir les « métadonnées ». Ces indications seront de préférence fournies juste avant le texte, dans le même fichier :

  • Notice biobibliographique succincte rédigée à la 3ème personne (titre, institution de rattachement éventuelle, pour les doctorants : nom du directeur de thèse, bibliographie indicative...), maximum 5-10 lignes.
  • Résumé de l’article (+ abstract en anglais) d’une dizaine de lignes, d’un seul paragraphe. Trois à cinq mots-clés en français et en anglais.

Normes typographiques

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