Michel Bernard, philosophe par tous les pores de sa peau, interrogeant inlassablement l'expressivité du corps et ce qu'il appelait « la corporéité dansante », fut pendant plus de trente ans obstinément et passionnément curieux de danse contemporaine. Spectateur inlassable, ami de très nombreux danseurs et chorégraphes, professeur généreux et exigeant, étranger à toute côterie et snobisme, auteur d'une pensée aussi érudite que prolixe, aussi rigoureuse que soucieuse d'être au plus près de l'expérience en danse et de ses métamorphoses, il fut l'élan fondateur et vital du département danse.
En 1989, contre vents et marées, de manière visionnaire, il conçut le département avec un collectif de danseurs et chercheurs, et le voulut au service des artistes et des chercheurs en danse. Inauguré par l'artiste Trisha Brown, une des sources essentielles de sa philosophie de la danse, son projet autant pédagogique que philosophique, a profondément déplacé la relation entre la danse contemporaine et la recherche à l'université.
Outre son petit ouvrage fort connu, Le corps, (Points Seuil en 1995), sa thèse importante sur L'expressivité du corps, Recherches sur les fondements de la théâtralité (publiée dès 1976), sa Critique des fondements de l'éducation ou généalogie du pouvoir et/ou de l'impouvoir d'un discours (1988), il a rassemblé ses articles essentiels sur la danse contemporaine dans De la création chorégraphique (2001). Il publie encore en 2011 une Généalogie du jugement critique, suivi de Considérations intempestives sur les dérives actuelles de quelques arts.
Comment ne pas voir que toute la clarté que je peux gagner repose sur une obscurité qui ne se dissipe qu'avec moi ? C'est en épigraphe de son projet d'ouvrage Les pensées du mouvement ou de la rationalisation du changement à la dynamique de l'imaginaire que Michel projetait de faire figurer cette citation de Judith Schlanger (in Fragment épique, une aventure au bord de la philosophie, Belin, 1999).
Le vendredi 12 février 2016 le département Danse de l'Université de Paris 8 rendra hommage à Michel Bernard, au Centre national de la danse à Pantin.
Avec un programme musical et chorégraphique, des témoignages, des discours, des documents sonores et visuels.